Analyses / Réflexions

Les Anecdotiques – Exploitation des Concepts n° 6  (2002)

Pièce radiophonique. Commande de Deutschland Radio Berlin – (54′)

 

Après avoir exploité un certain nombre de chose puisque j’en suis déjà au numéro 6, Les Anecdotiques représentent un concept que j’ai entamé avec Hétérozygote (1963), composition que j’avais justement appelée non sans dérision « musique Anecdotique ».
Cette préoccupation est donc présente dans toute une partie de mon travail.

 

Le projet était de profiter d’un certain nombre de voyages, professionnels pour la plupart, qui me permettaient de visiter d’autres pays.
J’enregistrais ce qui m’intéressait.

 

Avec ces enregistrements ou du moins ceux qui étaient réussis, je composais des petites séquences chacune dédiée à un lieu. C’est-à-dire qu’elles étaient faites avec les sons d’un seul endroit, plus ou moins représentatif de la réalité mais en tous les cas usant de cette réalité-là. Ces séquences sont des portraits qui peuvent faire penser à des devinettes acoustiques puisque ces endroits ne sont que rarement désignés sauf quand je pensais à le faire sur le moment.

 

Les séquences, c’est un des plans. Il y en a trois.

 

Pour le deuxième, je trouvais par hasard en fouillant dans mes archives, des sons électroniques qui n’avaient jamais servi, allez donc savoir pourquoi, et que je jugeais intéressant comme liaison entre les séquences. On a donc là à faire la balance perpétuelle entre le « concret » et « l’abstrait ».

 

Pour le troisième plan, je pensais à des interviews de jeunes femmes que j’avais faites, il y a longtemps, et que j’appelai « parole de femmes » mais que je n’avais pas non plus utilisés. Paroles spontanées et intimes. Elles ont trouvé leurs places dans cette composition, créant un discours parallèle qui n’a rien à voir avec les séquences, ni avec les sons électroniques, mais qui crée un nouveau balancement dans le discours.

 

Ces trois éléments forment une continuité dans laquelle il n’est pas important de distinguer de quoi et de qui il s’agit. Ce qui m’a intéressé, c’est de faire une composition aux significations ambiguës et qui fasse porter l’attention par des sens et des non-sens.

 

Ces trois plans jouent sur la perception du temps, chacun renouvelle la sensation et la forme du temps, du plus stable au plus actif. En outre, dès le début s’installe une structure apparemment systématique qui au cours du temps va se déraper.

 

Enfin si j’ai beaucoup travaillé sur l’anecdotique ou la narration qui sont aussi des sujets de temps, j’ai composé avec ces données mais d’une manière intuitive. L’exploitation des concepts est une manière pour moi d’être plus … »conceptuel ». Ainsi je montre que « les Anecdotiques » n’ont rien à voir avec la narration et cette composition est explicite de fait, de la différence qu’il y a entre narratif et anecdotique.

 

Ainsi va le temps chaque fois renouvelé.

 

Pour ne pas rester dans la devinette et pour ceux que cela intéresse, voici le titre des séquences :

1 – Numéro quatro, Ronda Espagne, juin 2001. Un groupe de touriste espagnol dans un musée.

2 – Plaza de toros, Ronda. L’arène est en réparation.

3 – Essayage, Saint Jean d’Angélys, France. Juillet 2001 Pendant une répétition, les comédiens essaient leur costume.

4 – Le ciel de Toscane Italie. Août 2001

5 – Superstrada n°2. Toscane.

6 – Un cyprès au coucher du soleil. Toscane.

7 – Mer d’Eze. France. Septembre 2001.

8 – Les Vendanges. Saint-Laurent d’Eze, France.

9 – Le Ranch. Texas USA, Octobre 2001.

10 – Chicago USA. Octobre 2001. Répétition pour un concert.

11 – Harley Davidson. Texas. Promenade du dimanche dans un village.

12 – Les chaussures rouges. L’Estaque, France. Juillet 2002. Visite à la cimenterie Lafarge.

13 – Trou de mer, L’Estaque. Juillet 2002

14 – La Joliette. Port de Marseille. France. Embarquement des containers.

15 – Les portes du Rove. L’Estaque, même période. Le Rove est un tunnel maritime qui donne dans une calanque à l’est de l’Estaque.

 

Enregistré par Brunhild Meyer et Luc Ferrari, monté, mixé et réalisé à l’atelier post billig par Luc Ferrari (entre juin 2001 et octobre 2002).

Traduction et voix en allemand : Brunhild Meyer Ferrari

Commande de DeutschlandRadio Berlin, Dr. Götz Naleppa