Presque rien N° 2 – Ainsi continue la nuit dans ma tête multiple
Un presque rien est un (c’est-à-dire pas deux) lieu homogène et naturel, non urbain, qui a des qualités acoustiques particulières (transparence et profondeur), où on entend loin et près sans excès, à l’échelle de l’oreille comme on dit à l’échelle humaine, sans technologie, où rien n’est dominant afin que les différents habitants sonores aient chacun leur parole et que la superposition de ce petit monde de vie ne fasse jamais qu’un presque rien.
Ou le contraire du sensationnel.
Puis quelque chose arrive et prend de la place.
Lorsque je finissais de réaliser Presque rien N° 2, j’écrivais ceci :
« Description d’un paysage de nuit que le preneur de son essaie de cerner avec ses micros, mais la nuit surprend le « chasseur » et pénètre dans sa tête. C’est alors une double description : le paysage intérieur modifie la nuit extérieure, le composant il y juxtapose sa propre réalité (imagination de la réalité) ; ou, peut-on dire, psychanalyse de son paysage de nuit. »
Ça, je ne sais pas si c’est très bien de le dire, ou de le dire comme ça.
Mais ce qui est très curieux dans cette histoire de Presque rien N° 2, c’est qu’après l’avoir terminé je n’ai plus pensé à le rendre publique, comme si cette chose était trop intime, comme si ça ne regardait que moi. Ça a duré deux ans. Un jour, je me suis forcé à le réécouter, et je me suis dit alors que je n’avais aucune raison de l’enfermer jalousement, qu’il fallait que je lui donne sa liberté, qu’il n’y avait aucune raison que cette nuit secrète ne voie pas le soleil.
La création de Presque rien N° 2 a eu lieu en 1979 dans la grande salle du Centre Pompidou à Paris, et je me souviens qu’à un certain moment, des gens ont ouvert leur parapluie. J’ai pris ça pour une douce connivence.