Analyses / Réflexions

Fable de la démission et du cendrier  (1994)

 

pour deux pianos et deux clarinettes (25′)

Commande de Radio France.

Création « Présences 95 » Maison de la Radio, février 1995

En 1982, j’ai créé une association. Elle réunissait dans un atelier, quelques mu­siciens venus d’horizons différents. Nous l’avons appelé : La Muse en Circuit, studio dans la tradition électroacoustique de travail sur la bande, mais pas spé­cialement tourné vers la composition magnétique, plutôt vers la mixité des moyens et des genres.

 

J’étais le président de cette association, j’en étais donc le responsable et je l’ai dirigée à ma manière. Elle est devenue dans le monde musical, une chose un peu spéciale, mais reconnue.

Au bout de 12 ans, j’ai pensé qu’il était temps de la laisser vivre sans moi, qu’il était temps pour moi de reprendre ma liberté. C’est pourquoi j’ai démis­sionné de ma charge de président.

 

Cette décision n’a pas été simple, ni pour moi, ni pour mes amis, et elle a duré entre mûrissement de la décision, la déclaration et les suites, plusieurs mois. Pendant le même temps, exactement, j’écrivais une partition pour 2 pianos et 2 clarinettes qui a suivi toutes les péripéties de cette affaire.

Peut-être au niveau de la composition, des sentiments se sont mélangés, car je ne crois pas la création innocente, et les profondeurs de l’invention naïves et aveugles, mais sinon, on peut dire qu’à part le même temps qui passe, à la fois avec les deux préoccupations, il n’y a pas d’autre rapport apparent ou audible, entre cette composition et ma démission.

 

Mais je me suis dit, ce même temps vécu avec intensité dans deux domaines différents, c’est une occasion unique, il faut la signifier comme telle.

Alors j’ai nommé la pièce fable de la démission et du cendrier.

 

Pendant la même période, j’inventais un procédé formel que j’appelais avec une certaine impertinence : Hypersérialisme Post-informatique !

Ce qui est singulier dans cette histoire c’est le temps, le printemps, comment naît la végétation qui fait les idées, comment ces idées se sont retrouvées groupées en un même temps et en une même pièce musicale. Dans ce sens c’est une Fable.

 

Je dirais encore quelques mots pour expliquer le cendrier.

Le cendrier, détourné de sa fonction naturelle qui est de recueillir des cendres, est un ustensile commode pour accueillir une certaine quantité de bouts de papiers pliés. C’est mon cendrier, il est profond et rond.

Le principe est donc de tirer du cendrier, des chiffres qui désignent soit des notes, soit des rythmes, des effets, des éléments, etc.

La composition, comme cela est indiqué dans la partition, est articulée autour d’un certain nombre de jeux du cendrier.

Ainsi par le hasard du geste et du temps, sont sorti des notes, des rythmes, avec lesquels j’ai composé.

 

Voici donc l’histoire de la Fable de la démission et du cendrier.

 

5 juillet 1994